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2015, retour sur l’actualité des brevets en France

Pas de révolution en France du côté des brevets cette année, mais quelques changements notables néanmoins.

  • Les posologies enfin reconnues brevetables ?

Alors que l’Office Européen des Brevets (OEB) accorde des brevets visant à protéger des posologies de médicaments, l’INPI, lui, les refuse d’emblée, s’appuyant sur la décision de première instance du 28 septembre 2010, dans l’affaire « Finastéride » qui opposait les sociétés Actavis Group et Merck Sharp & Dohme. Le Tribunal de Grande Instance de Paris avait annulé la revendication

Utilisation du [Finastéride] pour la préparation d’un médicament pour l’administration orale, utilisé pour le traitement de l’alopécie androgénique sur une personne et dans laquelle la quantité d’administration est d’environ 0,05 à 1,0 mg,

l’assimilant à une méthode de traitement thérapeutique, exclue du champs des inventions brevetables.

Depuis cette date, le doute subsistait sur la validité, en France, des brevets européens délivrés par l’OEB.

La position de la Cour d’Appel était, dès lors, très attendue.

La décision a été rendue le 30 janvier 2015. Saisie de la question, la Cour d’Appel de Paris a enfin reconnu la brevetabilité d’une revendication concernant la posologie d’un médicament:

« la brevetabilité d’une revendication de seconde indication thérapeutique reposant uniquement sur une caractéristique de posologie peut-être admise»

La Cour a bien entendu rappelé que pour être valable une telle revendication devait néanmoins «répondre à l’exigence de l’existence d’un enseignement technique ». En l’espèce, la Cour a analysé que la revendication ne comprenait pas d’effet technique distinct de l’art antérieur, et a conclu au défaut de nouveauté.

Nous attendons maintenant que l’INPI revoie sa pratique vis-à-vis des demandes de brevet françaises qui lui sont soumises, pour prendre en compte cette décision et adopter la position dominante en Europe.

  • Une obligation de plus pour les employeurs

La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite « loi Macron », spécifie maintenant que l'employeur doit informer le salarié auteur d’une invention du dépôt d'une demande de brevet et, le cas échéant, de sa délivrance (Article 175 de la loi).

  • Quelques jours supplémentaires gagnés pour les Certificats Complémentaires de Protection

Les Certificats Complémentaires de Protection (CCP) permettent d’étendre la durée de protection des brevets visant des médicaments ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM). Le CCP prend effet au terme de la protection par le brevet, pour une durée calculée sur la base de la période écoulée entre la date de dépôt de brevet et la date de la 1ère AMM dans l’Union Européenne.

Dans un arrêt du 6 octobre 2015 (affaire C-471/14, Seattle Genetics Inc.), la Cour de Justice de l'Union Européenne a considéré que cette date de « 1ère AMM » était, pour une AMM communautaire, la date de notification de la décision d’AMM et non la date d’octroi de l’AMM. Ceci peut se traduire par une prolongation de plusieurs jours de la durée de protection conférée par le CCP. Or chaque jour supplémentaire est précieux pour l’innovateur, dans sa guerre contre l’entrée précoce des génériqueurs sur son marché.

En application de la décision de la CJUE, l'INPI calculera désormais la durée de validité des CCP pour les médicaments, demandés sur le fondement d'une AMM communautaire, en prenant en considération la date de notification de l'AMM.

S'agissant des CCP délivrés, le titulaire pourra faire procéder à une inscription au Registre national des brevets pour signaler la date à laquelle l'AMM communautaire lui a été notifiée.

  • Secret professionnel absolu pour le Conseil en Propriété Industrielle

Dans la décision du 24 novembre 2015, la Cour d’Appel de Paris a considéré qu’il résulte de l’article L.422-11 du Code de la Propriété Intellectuelle que « le conseil en propriété industrielle est astreint à un secret professionnel absolu et que l’étendue de ses obligations en la matière est similaire à celle des avocats ».

Ça va mieux en le disant.

Très bonne année 2016 !

Marion Chajmowicz et Béatrice Tézier Herman

Béatrice Tézier Herman